Comédien théâtral, excessif, parfois critiqué pour sa propension à tourner n'importe quoi et n'importe comment, Jack Palance n’en a pas moins apporté au cinéma des méchants hors-norme, des personnages tourmentés et ‘bigger than life’ absolument inimitables.
Il lui faut attendre longtemps pour se voir consacré par l’Oscar, pour sa merveilleuse composition de cowboy essoufflé dans « LA VIE, L’AMOUR… LES VACHES » et rentrer au bercail après des décennies d’exil européen, de navets de série Z et ‘spaghetti westerns’ miteux. Sa prestation à la cérémonie des Academy Awards, où il a fait des pompes sur un seul bras à plus de 75 ans, est d’ailleurs entrée dans les annales des Oscars.
Sa carrière démarre fort au début des fifties, après qu’il ait servi de doublure à Brando au théâtre dans « UN TRAMWAY NOMMÉ DÉSIR ». À l’écran, Palance incarne des traîtres anthologiques grâce à un extraordinaire faciès bosselé, un style de jeu exalté : le malfrat pestiféré de « PANIQUE DANS LA RUE », le G.I. à bout de nerfs de « OKINAWA », l’acteur comploteur dans « LE MASQUE ARRACHÉ », le tueur aux gants noirs de « L’HOMME DES VALLÉES PERDUES » (son rôle le plus célèbre), Jack l’éventreur dans « MAN IN THE ATTIC », le chef Indien fanatique dans « LE SORCIER DU RIO GRANDE », l’homme de main de « PASSION SOUS LES TROPIQUES » où il évoque sans maquillage, le monstre de Frankenstein, le magicien assyrien dans « LE CALICE D’ARGENT », Attila dans « LE SIGNE DU PAÏEN ». Il joue des jumeaux dans « LA CAGE AUX HOMMES », l’un sympathique et l’autre calqué avec talent sur James Cagney.
Robert Aldrich l’utilise dans des emplois variés et subtils : la star névrosée inspirée de John Garfield, dans « LE GRAND COUTEAU », le G.I. martyrisé de « ATTAQUE ! » (un sommet de sa carrière d’acteur), le démineur héroïque de « TOUT PRÈS DE SATAN ».
Palance est superbe dans « LA PEUR AU VENTRE », dans le rôle de Roy Earle, gangster au bout du rouleau et (affublé d’un faux nez !) dans « JICOP LE PROSCRIT » en ‘gunman’ menacé de cécité, haï par son fils.
Il part pour l’Europe et enchaîne les nanars multinationaux. On peut retenir des réussites : le producteur inculte dans « LE MÉPRIS », un général de « LA BATAILLE D’AUSTERLITZ », le gladiateur allumé de « BARABBAS », le guérillero amoureux dans « LES PROFESSIONNELS » qui marque un bref retour aux U.S.A., le moine lubrique de « JUSTINE, LES INFORTUNES DE LA VERTU », le tueur drogué et manchot de « COMPAÑEROS ! ».
Son sort s’améliore dans les seventies, où Palance trouve des personnages à sa mesure : le cowboy usé de « MONTE WALSH », le tueur bouclé de « EL MERCENARIO », l’ex-officier radoteur dans « LES COLLINES DE LA TERREUR », le chef afghan déclinant dans « LES CAVALIERS » (où il est magnifique) et même Fidel Castro dans « CHE ! » où il arbore à nouveau un faux nez discutable.
Palance redevient très méchant dans « LE CLAN DES McMASTERS » en raciste manchot, « LA HAINE DES DESPÉRADOS » en hors-la-loi fanatique, « L’OR NOIR DE L’OKLAHOMA » en capitaliste en chapeau melon, « AMIGO... MON COLT A DEUX MOTS À TE DIRE » en frère de… Dany Saval et « WELCOME TO BLOOD CITY » en robot westernien, "CRAZE" en antiquaire londonien fanatique.
Après un long passage à vide où Palance joue les ‘bad guys’ à la TV et dans d’effarantes séries Z : « L’INFIRMIÈRE » ou encore « JIMBUCK », les eighties lui offrent un comeback durable et il s’installe définitivement dans le panthéon des acteurs mythiques : il est irremplaçable en peintre énamouré dans « BAGDAD CAFÉ », en caïd dans « BATMAN » et « TANGO & CASH », en propriétaire terrien dans « YOUNG GUNS » et en clochard galactique dans « SOLAR CRISIS ».
Son personnage de « LA VIE, L’AMOUR… LES VACHES » étant mort, il incarne son jumeau, ex-marin haïssant les chevaux dans la sequel « L’OR DE CURLY ». On le retrouve en flic dur à cuire dans la comédie familiale « COPS & ROBBERSONS », en militant écolo dans « CYBORG 2 », en gangster dans « MAN WITH A GUN ».
À noter pour la petite histoire, que Jack Palance, qui a tout de même consacré sa vie à jouer d’immondes individus, a refusé deux rôles taillés sur mesure sous prétexte… qu’ils étaient trop violents : Maggott le plus détraqué des « 12 SALOPARDS » et le directeur du pénitencier dans « TUEURS NÉS ».
C’est à la TV qu'il connaît un réel succès avec le rôle du pathétique boxeur de « REQUIEM FOR A HEAVYWEIGHT » en ‘56. Il tient le rôle du producteur Monroe Stahr dans « THE LAST TYCOON », du toréador mythique dans « THE DEATH OF MANOLETE », d’un racketteur dans « LITTLE MEN, BIG WORLD ». Il joue le boss d’un cirque dans la série « LE PLUS GRAND CHAPITEAU DU MONDE », un savant nazi œuvrant pour le TRUSH dans « DES AGENTS TRÈS SPÉCIAUX » (épisode sorti en salles sous le titre « L’ESPION AU CHAPEAU VERT »), un flic sympa dans le rôle-titre de la série « BRONK » et il apparaît en patriarche dans « THE HATFIELDS & THE McCOYS », reprend le rôle de John Wayne dans « THE GODCHILD », un remake de « THREE GODFATHERS ». Il poursuit les hors-la-loi dans « THE LAST RIDE OF THE DALTON GANG », joue un rancher dans « KEEP THE CHANGE ». Il refait son numéro bien au point de vieux cowboy dans « BUFFALO GIRLS ». Il recrée deux grands standards du fantastique : « DR. JEKYLL & MR. HYDE » et « DRACULA ET SES FEMMES-VAMPIRES », où il est prodigieux. Il anime en tant qu’hôte, une série documentaire sur le paranormal : « RIPLEY’S BELIEVE IT OR NOT ».
Aujourd'hui, « Jack the Knife » aurait fêté ses 92 ans. Happy birthday, Jack !