Omniprésent dans le ‘film noir’ et le western entre les années 40 et 60, Robert Ryan ne fut jamais une énorme vedette populaire, mais ses rôles de méchants sont toujours plus fouillés que la moyenne et ses personnages positifs ont des fêlures inhabituelles, stigmatisées par le visage tourmenté de l’acteur, son sourire en rictus et son regard intelligent mais angoissé, créant un beau contraste avec un physique athlétique d’ex-boxeur.
S’il débute en quasi-figurant dans « LES TUNIQUES ÉCARLATES » Ryan se fait une place au soleil à partir de « FEUX CROISÉS » où il est exceptionnel en militaire antisémite. Parmi ses grands rôles, retenons le Sundance Kid dans « FAR-WEST 89 », le psychologue pour enfants dans « LE GARÇON AUX CHEVEUX VERTS », l’ex-prisonnier de guerre vengeur dans « ACTE DE VIOLENCE », le milliardaire fou furieux dans « PRIS AU PIÈGE », le boxeur usé de « NOUS AVONS GAGNÉ, CE SOIR », le pilote dans « LES DIABLES DE GUADALCANAL », le caïd dans « RACKET », le projectionniste aigri dans « LE DÉMON S’ÉVEILLE LA NUIT ».
L’acteur se spécialise dans les rôles complexes et ambigus : le gangster implicitement homosexuel de « MAISON DE BAMBOU », le hors-la-loi pervers de « L’APPÂT », le lyncheur fasciste de « UN HOMME EST PASSÉ », le raté raciste dans « LE COUP DE L’ESCALIER » (superbe création !), le capitaine sadique de « BILLY BUDD », le colonel pointilleux de « 12 SALOPARDS », le méchant Ike Clanton de « 7 SECONDES EN ENFER ».
Il trouve heureusement quelques emplois plus sympathiques : le paysan dans « LE PETIT ARPENT DU BON DIEU », l’officier trop humain de « CÔTE 465 », le rôle-titre dans « LE SHÉRIF », Jean-le-Baptiste dans « LE ROI DES ROIS », l’ami des chevaux dans « LES PROFESSIONNELS ».
On l’a hélas, trop souvent relégué aux rôles d’officiers en ‘guest star’ dans des superproductions du style « LE JOUR LE PLUS LONG », « LA BATAILLE DES ARDENNES » ou « GUERRE SECRÈTE ».
Robert Ryan trouve encore de beaux rôles vers la fin de sa carrière : Deke Thornton, forcé de traquer son meilleur ami dans « LA HORDE SAUVAGE », le patriarche violent de « UNE FILLE NOMMÉE LOLLY MADONNA », un des piliers de bar de « THE ICEMAN COMETH », le gangster mondain de « ÉCHEC À L’ORGANISATION », le comploteur dans « EXECUTIVE ACTION », le shérif lessivé de « L’HOMME DE LA LOI » où il est franchement magistral.
Peu avant sa mort, Ryan apparaît en Europe en gouverneur dans le ‘spaghetti western’ « UNE MINUTE POUR PRIER, UNE SECONDE POUR MOURIR » et dans le curieux polar français « LA COURSE DU LIÈVRE À TRAVERS LES CHAMPS » où il est émouvant en malfrat au bout du rouleau.
À la TV, Ryan tient des rôles de répertoire comme Abraham Lincoln ou Jay Gatsby, il joue le capitaine du bateau dans « MAN WITHOUT A COUNTRY ».