Un ‘epic’ de 3 H 30 sur la création d’Israël, écrit par Dalton Trumbo, réalisé par Otto Preminger et tourné à peine une petite décennie après les évènements, cela peut sembler alléchant, voire instructif. Hélas, « EXODUS » a tout du film-monstre et échoue sur à peu près tous les points.
Désireux de ménager la chèvre et le chou, le scénario mixe à la truelle un cours d’Histoire avec de grosses ficelles mélodramatiques, le spectre de la Shoah avec une love story de ‘soap opera’, sans jamais trouver son équilibre. Ainsi, on s’étonne de voir s’accumuler les ellipses narratives franchement raides, alors que d’autres passages – comme l’évasion de la forteresse anglaise – sont surdéveloppés jusqu'à l’absurde. Même chose pour l’épisode de la grève de la faim à bord du navire à Chypre, dont on monte longuement la mayonnaise, pour le dégonfler brusquement, avant d’en avoir exploré la dimension tragique.
On suit donc « EXODUS » passivement, d’un œil de moins en moins attentif, pas même intéressé par le personnage de Paul Newman en mode « service minimum », qui affiche une moue boudeuse et quelques tics Actors Studio, dans un personnage mal défini qu'il se refuse obstinément à rendre sympathique. Nulle consolation du côté d’Eva Marie Saint, qui n’a jamais été plus mal photographiée jusqu'à faire dix ans de plus que son âge dans certaines scènes. Quelques vétérans habitués à se sortir de n'importe quelle situation, comme Lee J. Cobb ou David Opatoshu sont les bienvenus, même s’ils ne font pas oublier les prestations navrantes de Jill Haworth ou John Derek en chef arabe.
Malgré l’intérêt qu’on peut porter à la période décrite, malgré le discours final de Newman à l’enterrement d’un Arabe et d’une Juive ensevelis côte à côte, et dont le contenu prend 50 ans plus tard un écho triste et dérisoire, « EXODUS » demeure au niveau des intentions et ne donne qu’une envie : lire un bon bouquin sur le sujet. Tiens, pourquoi pas « EXODUS » de Leon Uris ?
À NOTER : après des années pendant lesquelles le film ne fut disponible qu’en édition DVD affreuse, écourtée et en 4/3, il vient de sortir dans un transfert Blu-ray encore imparfait, mais évidemment incomparable.