Superstar de son vivant, Steve McQueen n’a fait qu’intensifier son mythe post-mortem, s’installant au panthéon très fermé des icônes universelles telles Marilyn, Bogart ou James Dean. Son atout ? Une authentique rébellion contre tout système, une séduction rugueuse, un égotisme forcené, une tendance à l’autodestruction qui en ont fait un antihéros idéal des sixties, mais une personnalité s’adaptant curieusement à toutes les décades suivantes.
Dès ses débuts dans la série TV « AU NOM DE LA LOI », McQueen impose sa vision désarmante de Josh Randall, chasseur de primes têtu, âpre au gain et pragmatique, à cent lieux de tout cliché. Surtout en ‘58 ! À bien y regarder, les tout premiers prémices du « bounty killer » du ‘spaghetti western’ sont peut-être à chercher de ce côté-là.
Après une figuration dans la série B « GIRL ON THE RUN » et une apparition en voyou à cran-d’arrêt dans « MARQUÉ PAR LA HAINE », un second rôle le procureur juif dans « NEVER LOVE A STRANGER », puis un rôle principal dans la série B « DANGER PLANÉTAIRE » en teenager courageux (de 28 ans !), il apparaît en chauffeur d’une bande de voleurs dans « HOLD-UP EN 120 SECONDES ». Une de ses plus insipides prestations.
John Sturges – à qui McQueen doit beaucoup – lui offre trois chances d’accéder au vrai vedettariat : dans « LA PROIE DES VAUTOURS » il vole la vedette à Frank Sinatra dans un rôle de caporal magouilleur prévu pour… Sammy Davis, Jr., idem pour « LES 7 MERCENAIRES » où en pistolero malchanceux, il « enterre » la vedette en titre Yul Brynner. « LA GRANDE ÉVASION » confirme son individualité de héros solitaire et indomptable, alors qu'il n’apparaît pas énormément dans le montage final. Mais ses scènes à moto l’ont littéralement cristallisé dans la mémoire collective.
Il est officier de marine dans « BRANLE-BAS AU CASINO », fascine en G.I. taiseux et névrosé dans « L’ENFER EST POUR LES HÉROS », en aviateur suicidaire dans « L’HOMME QUI AIMAIT LA GUERRE », deux facettes du même personnage asocial et ingérable, des versions réalistes en somme du Hilts idéalisé de « LA GRANDE ÉVASION ».
Robert Mulligan l’impose dans des rôles plus profonds dans « UNE CERTAINE RENCONTRE » en musicien immature et « LE SILLAGE DE LA VIOLENCE » en rocker tête brûlée abîmé par une enfance malmenée. Il y est remarquable même si évidemment trop âgé pour le rôle, problème qu'il rencontrera d'ailleurs souvent lors de cette décennie.
McQueen est un joueur de poker arriviste dans « LE KID DE CINCINNATI », le métis orphelin de « NEVADA SMITH » (il est censé avoir 18 ans !), campe un mécano rebelle dans « LA CANONNIÈRE DU YANG-TSÉ » (peut-être son plus beau rôle), n’est pas très bien casté en banquier peroxydé dans « L’AFFAIRE THOMAS CROWN », trouve son rôle le plus archétypique dans « BULLITT » en flic taciturne et obsessionnel, aussi dangereux que les tueurs qu'il traque comme un prédateur dans la jungle.
Il change de registre en jouant le garçon de ferme finaud dans « REIVERS », cède à sa passion pour les courses en incarnant le coureur dans le triste « LE MANS » (qui le fâcha définitivement avec Sturges qui avait commencé le film), il s’associe à Sam Peckinpah pour camper un champion de rodéo fatigué dans « JUNIOR BONNER, LE DERNIER BAGARREUR » et le braqueur taciturne dans « GUET-APENS ». Sur ce dernier film, McQueen rencontre et épouse Ali MacGraw et sa carrière s’enlise inexplicablement. Après « PAPILLON » où il incarne le forçat français et « LA TOUR INFERNALE » où il est parfait en pompier héroïque, McQueen devient ermite, grossit, se fait oublier pendant des années. Quand il revient, c’est obèse et barbu en citoyen écolo dans « AN ENEMY OF THE PEOPLE ». Son vrai comeback, en hors-la-loi vieillissant dans « TOM HORN : SA VÉRITABLE HISTOIRE » et « LE CHASSEUR » où il est un chasseur de primes moderne, ne redore pas son blason.
McQueen meurt à 50 ans, rongé par le cancer, laissant des millions de fans inconsolables.
À noter que McQueen apparaît dans son propre rôle de coureur à moto dans le documentaire « CHALLENGE ONE » et qu’il exécute anonymement les cascades à moto d’une série B oubliée des seventies, « DIXIE DYNAMITE ».
À la TV, on peut voir McQueen à ses débuts dans « THE SHRIVINGTON RAID » en hors-la-loi, « THE DEFENDER » en voyou accusé de meurtre, où il affiche un style excessif et grimacier tout à fait surprenant, puis en reporter confronté aux envahisseurs et en joueur risquant son petit doigt dans deux « ALFRED HITCHCOCK PRÉSENTE ». Il joue le bandit Longley dans un épisode de « TALES OF WELLS FARGO ». À noter qu’il a créé le rôle de Randall dans un épisode de la série de Robert Culp, « TRACKDOWN ».
À NOTER : dans l’actu toujours très foisonnante de Steve, 30 ans après sa mort, la sortie d’un coffret DVD pour les fêtes, intitulé « STEVE McQUEEN : L’INSOUMIS ».