« L'HOMME DE L’ARIZONA » écrit par Burt Kennedy d'après un roman d'Elmore Leonard, démarre comme un banal western de série, avec le vieillissant Randolph Scott dans un personnage un peu gauche et ‘plouc’ à la Gary Cooper et des seconds rôles cliché du genre comme le vieux muletier. Mais à l'arrivée au relais de diligence, le film décolle brusquement et se transforme en tragédie âpre et dépouillée, dans le cadre écrasant d'un désert de rocs stériles et arides. Comme si le réalisateur avait voulu appâter le public et le piéger insidieusement dans un film beaucoup moins ludique que ne le promettaient les premières minutes.
À l’instar de Lee Marvin dans « 7 HOMMES À ABATTRE », c'est le méchant, Richard Boone qui devient alors le cœur du film. ‘Méchant’ tout relatif d'ailleurs, puisqu'il épargne le héros sans raison particulière, méprise visiblement la sauvagerie de ses acolytes et se montre même attentionné avec son otage. L'élégance rugueuse de l'acteur, sa façon de rire, sa voix cultivée, en font un personnage inattendu et ambigu qui aurait pu en d'autres circonstances, devenir un type bien. Pendant tout le film, il recherche une complicité avec Scott, un lien, que celui-ci lui refuse obstinément. Le contraste entre Boone et son bras droit Henry Silva, plus inquiétant que jamais en pistolero ‘racaille’ imbécile et sadique, est également passionnant. On a les amis qu’on mérite !
Les protagonistes sont joués par Randolph Scott, plus souriant que d’habitude et la mûrissante Maureen O'Sullivan (la Jane sexy des premiers « TARZAN » de Weissmuller) en vieille fille malheureuse que personne n'épargne (« Cessez de pleurnicher », lui dit Brennan « ça ne sert à rien »). Boone lui, va jusqu'à lui trouver un « physique ingrat » !
Comme toujours chez Boetticher, les cadrages sont splendides, les silhouettes se détachent du paysage avec grâce. La violence est très crue pour l'époque : une tête explosée à bout-portant d'un coup de fusil, un homme aveuglé par une balle au visage et même un enfant abattu (hors du champ de la caméra, mais tout de même !) et jeté au fond d'un puits.
Comme « 7 HOMMES À ABATTRE » et « LA CHEVAUCHÉE DE LA VENGEANCE » les autres chefs-d’œuvre du réalisateur, « L'HOMME DE L’ARIZONA » est un film quasi parfait qui ne fait vraiment pas son demi-siècle.