Cela paraît difficile à croire, mais depuis mars dernier, Mario Girotti – plus connu sous le nom de Terence Hill – a 70 ans. C'est à dire qu'il est plus âgé que son partenaire Henry Fonda, quand ils tournèrent ensemble « MON NOM EST PERSONNE » ! Ainsi, le ludion au physique de playboy, yeux d’azur et dents blanches, a-t-il aujourd'hui l’âge d’être grand-père.
Terence Hill débuta très jeune en Italie, sous la direction de Dino Risi ou Vittorio de Sica, il joua un des soupirants de Claudia Cardinale dans « LE GUÉPARD », mais sa carrière ne semblait aller nulle part, jusqu'à ce qu'il apparaisse en lieutenant de cavalerie dans le western allemand « LE TRÉSOR DES MONTAGNES BLEUES », où figure également Klaus Kinski. Là, un déclic s’est produit, et le bellâtre au sourire benêt, à la gentillesse innée, s’est trouvé une niche. Exit Mario, hello Terence !
Il tourne encore trois ou quatre westerns germaniques, avant de retourner en Italie, pour « RITA NEL WEST », une comédie balourde avec la chanteuse Rita Pavone. Mais Terence Hill se cherche encore, et s’il tourne trois westerns, dans le rôle du chasseur de primes Cat Stevens (sic !) : « DIEU PARDONNE... MOI PAS », « LA COLLINE DES BOTTES » et « LES 4 DE L’AVE MARIA », il en est encore à singer les maniérismes de Clint Eastwood. Bronzé à outrance, cigarillo au bec, yeux plissés, il n’est qu’un pistolero parmi d’autres. Plus joli garçon, mais c'est tout. En 1968, on fait de lui un parfait sosie de Franco Nero, pour « DJANGO, PRÉPARE TON CERCUEIL », où il est quasiment impossible de le différencier de son modèle.
Le salut arrive deux ans plus tard, avec « ON L’APPELLE TRINITA », dans lequel Terence Hill se trouve enfin : dans ce personnage de SDF de l'Ouest, paresseux, faussement simplet, et d’une adresse diabolique avec un revolver, il crève l’écran, et forme un tandem extraordinairement populaire avec l’imposant Bud Spencer, qu'il avait déjà croisé dans les aventures de Cat Stevens. S’ensuivra un « ON CONTINUE À L’APPELER TRINITA », de même facture. Les films sont franchement moyens, mais les deux compères s’y imposent comme les Laurel & Hardy du western, et deviennent des superstars, ensemble ou même séparément.
Dans « EL MAGNIFICO », Hill joue un lord anglais, un « pied-tendre » débarquant dans l'Ouest. Sergio Leone qui haïssait les « TRINITA », engage Terence Hill sur sa production « MON NOM EST PERSONNE », où il confronte les clowneries infantiles de l’ersatz italien, à son modèle U.S., Henry Fonda himself. Mais ce n’est pas exactement le message qui finit par filtrer de ce film charmant. Le vieux pistolero est fatigué et corrompu, et n’hésite pas à tuer, alors que son « fan » italien est drôle, débordant de vie, et préfère ridiculiser son ennemi, en lui plantant un index entre les fesses, comme dans le dernier plan du film. Le succès est colossal ! Leone et Hill tentent de remettre le couvert avec « UN GÉNIE, DEUX ASSOCIÉS… UNE CLOCHE », mais le cœur n’y est déjà plus. Trinita a grillé ses cartouches...
Au début des années 90, Terence Hill, légèrement blanchi et l’œil un peu éteint, a l’idée saugrenue d’incarner… Lucky Luke ! Le temps de quelques films et d’une série TV tournée aux U.S.A., il en donne une interprétation bâtarde, avec un look proche des films de Leone (en plus propre), et un Jolly Jumper parlant en voix « off ». Guère convaincant. C'est même le moins que l’on puisse dire !
En 2009, il signore Girotti n’a pas dételé, puisqu’on annonce un « DOC WEST », qu'il réalise lui-même, un énième retour au Far West.
L’acteur a peut-être tourné énormément de navets, a contribué sans le vouloir à la chute du western européen, en y introduisant le gros comique qui tâche, mais il possède un don qui le rend pratiquement intouchable : celui de la sympathie.