On comprend assez vite le but de la manœuvre : les producteurs et auteurs de « ROCKET GIBRALTAR » ont très probablement voulu faire de leur film, ce que « LA MAISON DU LAC » avait représenté pour Henry Fonda – un hommage, un dernier tour de piste, et une « sortie » en beauté pour Burt Lancaster.
Si le film n’est pas dénué de mérite, le but n’est pas complètement atteint. Par la faute d’abord d’un scénario gentiment « cute », mais terriblement prévisible. On devine déjà la fin, dans la séquence où le papy raconte les funérailles Viking à ses petits-enfants. De plus, le manque de réel conflit entre les personnages, la sympathique harmonie régnant dans cette famille, n’est pas propice aux grandes scènes, et le film se déroule à un rythme pépère, entrecoupé de séquences à la plage, d’intermèdes poliment sexy, et de repas pleins de rires et de larmes.
Nous ne sommes pas loin du téléfilm lambda, ne serait-ce la prestation de Lancaster. Visiblement diminué, fatigué, il habite tout le film de sa présence fragile. Ce personnage, qui a déjà un pied dans la tombe, est dans la lignée de ceux qu'il joua à la fin de sa carrière, que ce soit dans « VIOLENCE ET PASSION » ou « ATLANTIC CITY », et son jeu sobre, relâché, ajoute à l’ambiance légèrement morbide du film. Il est troublant de voir ce comédien, jadis caractérisé par son énergie survoltée, son autorité impérieuse, sa rage permanente, réduit à l’état de vieillard moribond, passant d’une sieste à l’autre, et pleurant en écoutant des 33 tours de Billie Holiday.
L’acteur est très bien entouré de jeunes comédiens qui feront leur chemin, comme Kevin Spacey étonnamment simple et sans tics, Bill Pullman, et Frances Conroy et Patricia Clarkson, qui seront à nouveau sœurs vingt ans plus tard dans la série TV « SIX FEET UNDER ». Quant au petit Macauley Culkin, disons qu'il est encore supportable.
À voir pour Burt Lancaster donc, mais le tout laisse un arrière-goût indéniablement cafardeux.