« PETER IBBETSON » est un film qui a fait couler beaucoup d’encre et a marqué des générations de cinéphiles. Œuvre poétique, film « de crise » prônant l’évasion par le rêve, le film apparaît comme une magnifique parabole sur le pouvoir du cinéma. Dans un monde sombre, violent, sans espoir, la seule façon d’être heureux est encore de s’enfermer dans le noir et de vivre « dans ses rêves ». Sans limite d’espace, de temps, dans cet endroit où on est toujours beau et jeune, où l’amour ne s’use jamais.
Cela pourrait être mièvre et fastidieux, c'est plutôt poétique et fiévreux. C'est probablement dû au fait que dans ce genre de film, on s’attend à trouver Leslie Howard en vedette et Douglas Sirk à la réalisation. Au lieu de cela, c'est Gary Cooper qui endosse le rôle de l’ancien enfant mal grandi, mal ajusté à la réalité, jamais remis de ses traumatismes de jeunesse, tandis que Henry Hathaway, spécialiste du film d’action robuste et viril tient la caméra. Le « casting » peut sembler bizarre, mais cela permet au film de ne jamais sombrer dans le mélo lacrymal et de susciter par moment une profonde et authentique émotion.
Physiquement modifié par une pourtant discrète moustache, ‘Coop’ compose un Peter Ibbetson inoubliable. Élégant, aérien, d’une absolue mélancolie, il n’utilise pratiquement aucun de ses ‘gimmicks’ habituels et se montre étonnamment crédible en amoureux romantique ultime. À noter que l’acteur est dans ce film architecte de profession, comme il le sera des années plus tard dans un autre rôle emblématique : « LE REBELLE ». À ses côtés, Ann Harding est plus conventionnelle. La petite comédienne tenant son rôle à l’âge de huit ans était plus intéressante. Dans un petit rôle, on aperçoit Ida Lupino qui disparaît rapidement.
Film sur le rêve, la fuite, le pouvoir de l’imaginaire, l’amour fou et pas mal d’autres choses, « PETER IBBETSON » pourrait parfaitement être visionné en double-programme thématique avec son équivalent contemporain « INCEPTION ». Rien à voir ? Pas si sûr…