« LES ÉCHAPPÉS DU NÉANT » commence comme un poussif aïeul de « AIRPORT », puis l’avion s’écrase dans la jungle et il évoque subitement « LA MORT EN CE JARDIN » de Luis Buñuel, curieusement tourné la même année.
Le manque de moyens et le tournage en studio dans une forêt artificielle, rendent le spectacle un peu morne et languissant, mais dans son dernier tiers, les personnages prennent de l’épaisseur et on se surprend à être en empathie avec eux et à souhaiter qu'ils s’en sortent. Ces naufragés du ciel sont campés par des comédiens intéressants : Robert Ryan n’a pas grand-chose à faire, à part prendre un air viril dans le rôle du pilote au passé douloureux. Anita Ekberg est une véritable bombe atomique (et anatomique) en call-girl se découvrant un instinct maternel, Phyllis Kirk est très bien et a une jolie scène de bagarre dans une mare avec Anita. Gene Barry se délecte d’un rôle de pleutre odieux et arrogant. Mais c'est Rod Steiger qui s’octroie la part du lion, dans un rôle passionnant de condamné à mort dégoûté par l’injustice, qui à la fin de l’aventure deviendra en quelque sorte la main de Dieu, lorsqu’il devra choisir qui survivra ou non. Belle idée de scénario et excellente interprétation de Steiger, qui après avoir cabotiné pendant la moitié du film avec son accent allemand et sa voix nasillarde à la Brando, devient subitement le bel acteur qu'il savait être, parfois. Pas assez souvent, hélas !
Le film met longtemps à démarrer vraiment et il faut s’accrocher, fermer les yeux sur la surabondance de clichés, pour parvenir jusqu'à ce moment où tout bascule et où les vrais enjeux font enfin surface. La dernière scène où commencent à apparaître les ombres de ces Indiens invisibles, est absolument saisissante.