Unique film réalisé par Frank Sinatra, « L’ÎLE DES BRAVES » est une coproduction américano-japonaise, ce qui a déjà pour avantage de proposer une écriture nuancée et non-manichéenne de la WW2.
Le sujet anticipe sur « DUEL DANS LE PACIFIQUE » et « TROP TARD POUR LES HÉROS », mais le film n’en possède pas le ton acerbe et âpre. Pendant longtemps, Sinatra hésite entre la grosse comédie, le pamphlet anti-guerre et le pur mélo guerrier. Il n’arrive vraiment à ses fins que lors des scènes entre le capitaine Clint Walker et son « jumeau » nippon, Tatsuya Mihashi : deux soldats nobles et loyaux, qui nouent une amitié mise à rude épreuve par leur isolement sur une île oubliée de tous et par leur sens du devoir. Pour le reste, ce sont des péripéties laborieuses, des personnages à peine esquissés et des conflits qui ne progressent pas.
De plus, la direction d’acteurs est assez flottante : Sinatra lui-même n’est pas au top de sa crédibilité en infirmier pochtron dans ce qui n’est étonnamment qu’un rôle secondaire de faire-valoir. Sans parler de l’épouvantable Tommy Sands en lieutenant braillard. Le grand Walker endosse un rôle à la John Wayne avec son effacement habituel et sa sempiternelle expression douloureuse et parmi les soldats, on reconnaît Brad Dexter – un pilier du « Rat Pack » – en sergent boxeur à cigare (un vrai cliché sur pattes !).
La photo exploite parfaitement les paysages de rêve de l’île, les intentions du scénario étaient bonnes et quelques séquences surnagent, mais « L’ÎLE DES BRAVES » succombe en fin de compte à son manque de rigueur (que viennent faire les deux ridicules flash-backs vers la fin, à part montrer de jolies jeunes femmes ?) et à un éparpillement des centres d’intérêt.