"LE SYNDROME CHINOIS" (1979)

Il peut sembler paradoxal qu’un film datant de plus de trente ans et s’intitulant « LE SYNDROME CHINOIS » soit aujourd'hui de la plus brûlante actualité, par rapport à la situation nucléaire au Japon. Produit par Michael Douglas, ce « thriller citoyen » fait encore – et probablement plus que jamais – froid dans le dos, car outre l’aspect suspense traditionnel qui sous-tend l’intrigue, il démontre surtout que l'homme ne maîtrise pas le monstre qu'il a créé. Et  qu’à force d’approximations, de dissimulations, de tricheries, l’accident fatal n’est qu’une question de temps.

Sec, efficace, sans dérivatif, le scénario se concentre sur trois personnages emblématiques : la journaliste-potiche rêvant de présenter les news, le caméraman écolo révolté et grande gueule et le responsable de la centrale, qu’une prise de conscience tardive va mener droit au tombeau. Les enjeux sont tellement forts et l’aspect « documentaire » si hallucinant, que le film peut se passer d’humour, de psychologie vraiment fouillée, voire d’une esthétique chiadée. Le thème ici, se suffit à lui-même : oui, l’être humain est assez fou furieux pour risquer sa propre planète pour quelques milliards de dollars. Et si la « bête » signale qu'elle risque de sortir de sa torpeur, il suffit de se boucher les oreilles en espérant qu'elle se rendorme.

Avec son look de beatnik hirsute, Douglas littéralement habité, a rarement été aussi énergique et intéressant à l’image. Jane Fonda, d’une beauté renversante, est plutôt inattendue dans un rôle évolutif de « bonne fille » ambitieuse mais docile, confrontée à une réalité qu'elle ne soupçonnait pas. Et Jack Lemmon, voûté, l’œil humide, écrasé par les responsabilités, offre un portrait humain (bien trop humain !) de celui censé garantir la sécurité de ses concitoyens. Mention aussi à Wilford Brimley, excellent dans un rôle de fonctionnaire prudent adepte du retournement de veste.

« LE SYNDROME CHINOIS » (une allusion à la matière nucléaire qu’un accident risque de libérer et qui menace de s’enfoncer en terre, jusqu'en Chine) a étonnamment peu vieilli et prend aujourd'hui des accents d’avertissement lucide et militant. Qui écoutait vraiment, il y a 33 ans ?