Après la trilogie du « PARRAIN » et la série « LES SOPRANO », « CORLEONE » s’inscrit instantanément dans les chefs-d’œuvre du film de mafia. Découpée sur six films de 90 minutes, cette bio de Totó Riina, le ‘capo dei capi’ (le chef des chefs), le ‘corleonese’ venu des terres les plus misérables de Sicile, réunit tout ce qu’on aime dans le cinéma italien.
Si le premier film évoque bien sûr les flash-backs de la saga de Coppola, la suite retrouve les accents du cinéma des seventies : on voit passer les mânes d’Elio Petri, Francesco Rosi, Gillo Pontecorvo, au fil de ces années de violence et de conquête du pouvoir. C'est constamment passionnant, informatif et documenté sans jamais cesser d’être distrayant. De plus, les comédiens étant totalement inconnus (en France, tout du moins), l’identification à leurs rôles est totale.
Claudio Gioè est particulièrement saisissant en Riina. Petit, râblé, rugueux comme un silex, mû par la haine et l’esprit de revanche, il se déshumanise progressivement, sombre dans la paranoïa et n’offre jamais matière à fascination ou empathie, comme pouvait le faire Pacino dans le rôle de Michael Corleone, par exemple ou même Scarface. Face à lui, dans un personnage fictif, Daniele Liotti est remarquable dans le rôle du flic, ex-ami d’enfance de Totó, qui le traque toute sa vie, tel une ombre, une mauvaise conscience, un jumeau en négatif. Magnifique idée scénaristique ! Et deux comédiens qu’on a envie de revoir ailleurs.
Les figures comme le général Dalla Chiesa, le juge Falcone, passent au fil d’épisodes rythmés par les exécutions sommaires. « CORLEONE » trace un panorama réaliste et effrayant de la mainmise de la Cosa Nostra sur l’Italie. Tout un pays qui semble régi par un petit homme exilé dans sa maison à la campagne, passant ses journées à nourrir ses poules et à décider de qui doit vivre ou mourir.
« CORLEONE » est une réussite majeure, au moins digne des meilleurs téléfilms anglo-saxons, à découvrir urgemment.
À NOTER : la curieuse jaquette du DVD, qui évoque clairement la silhouette de Brando dans la séquence du mariage dans « LE PARRAIN ». À y regarder de plus près, on s’aperçoit qu'il s’agit en fait du… flic, Liotti, qui évidemment ne porte jamais un smoking dans la série !