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10 mai 2013 5 10 /05 /mai /2013 06:28

BOURGEOIS (1)En pleine mouvance de films de ‘vigilantes’ venue des U.S.A., Mario Monicelli décide d’en donner sa propre lecture, sans les artifices du polar et en autopsiant à fond le mythe du « justicier » tant adulé des foules.BOURGEOIS

« UN BOURGEOIS TOUT PETIT, PETIT » est une pure merveille d’intelligence, de férocité et de noirceur, qui nous prend d’abord gentiment par la main pendant une bonne moitié de son métrage en nous brossant un portrait de petit fonctionnaire borné, Alberto Sordi, qui ne rêve que d’une chose : voir son fiston adoré lui succéder au ministère. Pour cela, il est prêt à tout : lécher toutes les bottes, avaler des couleuvres, devenir franc-maçon si on le lui demande, n'importe quoi pour voir l’héritier suivre ses médiocres traces. Mais un jour, celui-ci prend une balle perdue lors d’un braquage et la vie d’Alberto va basculer.

La seconde moitié du film est d’une noirceur suffocante, atroce, sans une lueur d’espoir. Et si le pauvre père éploré se venge effectivement d’un des voyous de façon assez horrible et détaillée sans pitié pour le spectateur, les auteurs ne nous feront pas l’aumône de nous montrer Sordi en ‘vigilante’. Il le deviendra certainement, mais après le mot ‘FINE’. Pas de vengeance cathartique, pas de fusillades sanglantes, pas « d’entertainment », autrement dit. Pour Monicelli, un justicier ne peut être qu’un pauvre type qui a perdu la raison et n’a BOURGEOIS (2)trouvé que le meurtre pour combler le grand vide qu’est devenue son existence.

Sordi est absolument magistral, passant de la veulerie comique, de la vantardise ridicule à la pure tragédie. Ce qu'il fait dans la seconde partie du film est probablement ce qu'il a accompli de plus fort dans sa carrière. Face à lui, Shelley Winters est étonnamment crédible en épouse soumise, superstitieuse et finalement catatonique. Et une mention à l’excellent Romolo Valli en supérieur hiérarchique qui passe une bonne partie de son temps à gratter ses pellicules qu'il recueille dans un tiroir de son bureau.

Le grand cinéma italien a (presque) toujours été un savant dosage de comédie satirique aux limites du clownesque et de constat social âpre et sans concession. Ce film dur, cruel et magnifiquement intelligent en est un bel exemple. Une grosse baffe !

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commentaires

K
Très bon blog, merci beaucoup
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M
« Sinon, il faut urgemment que ce bijou soit édité en France !»<br /> <br /> Oui, ça fait longtemps qu'il y a urgence. Ce titre est réclamé à cors et à cris depuis au moins dix ans sur plusieurs sites, comme 'Dvdtoile.com' et autres. La diffusion en France du cinéma italien<br /> sur DVD échappe à toute logique, ou presque. Si parmi les maîtres de la comédie à l'italienne je me limite à Monicelli, eh bien 'Le Pigeon', 'La Grande guerre' et 'Les Camarades' sont sortis - ce<br /> qui est bien le moins ! - mais les deux derniers dans une édition étrangement cheap. (Ce qui sent le credo: Antonioni ou rien !) Par contre, toujours de Monicelli, un des plus grands films comiques<br /> de l'histoire du parlant, 'L'Armée Brancaleone', avec Gasssman et Volontè, n'est toujours pas sorti (ni son très bon sequel), 'Mes chers amis' - son plus grand succès commercial, qui a fait plus<br /> d'entrées encore que 'L'Armée', 'La Grande guerre' et 'Le Pigeon' - est sorti en Angleterre mais pas en France, bien que le regretté Philippe Noiret y soit en vedette: cherchez l'erreur. Et donc,<br /> de même, on attend toujours la sortie DVD de 'Un bourgeois tout petit, petit'. Pendant ce temps, un Monicelli mineur (mais amusant) comme 'Nous voulons les colonels' est sorti, lui. De même que<br /> 'Casanova 70', vraiment pas son meilleur, du propre aveu de Monicelli qui a souvent expliqué que la réussite d'une comédie tient toujours un peu du miracle. Mais celui-là est sorti, tandis que<br /> d'autres bien meilleurs ne sont pas sortis. Peut-être parce qu'il y a Mastroianni dedans ?<br /> <br /> En tout cas, le cinéma japonais par exemple a été bien mieux servi, de toute évidence par des gens qui, eux, connaissaient leur affaire. Ça fait toute une différence, d'avoir les Misumi qu'il faut,<br /> les Okamoto et les Gosha et les Kudo qu'il faut. Côté DVD italien en France, c'est incohérent, le bon grain côtoie continuellement l'ivraie, comme si les éditeurs étaient des ignares du vaste<br /> réservoir italien. Je soupçonne parfois un petit complexe de supériorité franco-français...
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L
- "M'sieur, vous ne voulez quand même pas dire qu'un justicier c'est un facho ? Non ?"<br /> - "M'sieur, c'est sorti en dvd en France ?"
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F
<br /> <br /> Meuh non, mon p'tit Lemmy ! Pas du tout... C'est un gentil monsieur un tout petit peu nerveux et rancunier, c'est tout.<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> A part ça, non, le film est trouvable en Italie dans une belle copie sous-titrée italien. Si on se débrouille un peu dans la langue (c'est mon cas), ça va. Sinon, il faut urgemment que ce bijou<br /> soit édité en France ! <br /> <br /> <br /> <br />
M
« ...les auteurs ne nous ferons pas l'aumône de nous montrer Sordi en 'vigilante'. »<br /> <br /> Le petit Marco (agitant frénétiquement la main): -M'sieur! M'sieur! M'sieur! M'sieur!<br /> <br /> Le prof Jay Walk (stoïque et résigné): - Encore? Bon, qu'est-ce que c'est, cette fois?<br /> <br /> Le petit Marco (arborant à nouveau son sourire carnassier des mauvais jours): Au tableau, vous avez écrit : "...les auteurs ne nous ferons pas..." Ça serait pas plutôt "feront", dites, m'sieur<br /> ?<br /> <br /> Prof Jay Walk (se tournant vers le tableau tout en grommelant tout bas): - Ah le sale môme, un de ces quatre je vais te me le...
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F
<br /> <br /> Le prof : "Merci mon petit Marco, tu as bien suivi le cours. Bravo ! Je rectifie. Au fait, tu demanderas à tes parents de prendre rendez-vous avec moi, si tu veux bien... J'aimerais leur parler".<br /> <br /> <br /> Marco : "De quoi, m'sieur ?"<br /> <br /> <br /> Le prof (air mauvais) : "Du fait que tu es si doué, qu'il va falloir que tu sautes une classe et probablement que tu changes d'école".<br /> <br /> <br /> <br />
M
« Pour Monicelli, un justicier ne peut être qu’un pauvre type qui a perdu la raison. »<br /> <br /> Ça fait un bon quart de siècle que je n'ai revu 'Un Bourgeois tout petit, petit', qui fut un des grands succès à l'étranger de la comédie à l'italienne alors finissante. Mais je me rappelle avec<br /> acuité la toute dernière scène du film, où la boucle est bouclée, où l'on comprend où tout ceci nous menait. Sans révéler en quoi elle consiste, disons que le propos du film est carrément ceci : un<br /> 'vigilante', c'est en fait un serial killer qui a trouvé une niche.
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F
<br /> <br /> Grosso-modo, oui.<br /> <br /> <br /> Merci en tout cas, de m'avoir rappelé l'existence de ce film marquant et parfaitement rond et abouti. <br /> <br /> <br /> <br />

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