News, photos, critiques films et DVD, avis et commentaires sur le cinéma populaire, ses stars, ses mythes, mais aussi sur les séries TV et quelques à-côtés.
Il y a pas mal de choses déroutantes dans « LE MAÎTRE DE LA PRAIRIE » et la signature d’Elia Kazan n’est pas des moindres. Complètement atypique dans sa filmographie, ce mélodrame westernien bâti autour du couple Spencer Tracy-Katharine Hepburn, se distingue par sa longueur peu appropriée et par l’ambiguïté constante de son propos.
En deux heures, Kazan tente de raconter une véritable saga familiale et 25 ans d’Histoire de l'Ouest, avec l’arrivée des colons, la résistance des gros éleveurs, etc. C'est trop court ou trop long, et quelques ellipses dans le récit sont vraiment sévères et dommageables (le début est cavalièrement expédié), empêchant d’entrer complètement dans le film. Quant à l’ambiguïté (oui, là éventuellement, on peut reconnaître la griffe du réalisateur !), elle est inhérente au scénario : car au fond, que raconte le film ? Quelle en est la morale ? Tracy, un riche rancher, est amoureux de sa prairie qu'il a dû jadis arracher aux Indiens. Il veut la préserver telle quelle et refuse de la céder aux émigrants. Il passe d’abord pour un égoïste et un sale capitaliste sans cœur. Mais l’épilogue lui donne raison : ayant trop et mal exploité la terre, les fermiers en ont fait un désert stérile, un cimetière. Qu’en conclure ?
Même chose pour les aspects plus intimes de l’histoire : ‘Kate’ a une liaison avec le juge Melvyn Douglas, d’où naît un fils bâtard élevé par Tracy. Les époux se séparent pendant vingt ans et il faut la mort du garçon pour qu'ils se réunissent. Drôle de morale, là aussi !
On suit donc ces personnages peu sympathiques dans leurs drames familiaux, sans jamais s’impliquer. Les stars ne sont pas très bien castées : elle trop âgée et minaudante, lui manquant singulièrement de dimension « épique » pour un tel emploi. Robert Walker s’en sort plutôt mieux dans le rôle du bâtard tête brûlée.
« LE MAÎTRE DE LA PRAIRIE » est donc un film bancal, dont certains plans évoquent John Ford et d’autres souffrent de transparences hideuses. Malgré une ou deux séquences réussies, comme ce bétail perdu dans la tempête, on serait bien en peine de deviner la carrière à venir de Kazan.