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Il est long le chemin qui a mené le cowboy emprunté et longiligne de la série TV
« RAWHIDE » à la présidence du festival de Cannes.
Clint Eastwood traîne d'abord ses guêtres dans des séries B Universal : le laborantin distrait de « LA REVANCHE DE LA CRÉATURE », les marines de « FRANCIS DANS LA MARINE » et « BRISANTS HUMAINS », les pilotes de chasse de « TARENTULA » où il bombarde l’araignée géante, « LAFAYETTE ESCADRILLE », et « ESCAPADE IN JAPAN », le 1er Saxon de « LADY GODIVA », le shérif benêt de « LA VRP DE CHOC » ou le Sudiste emporté de « AMBUSH AT CIMARRON PASS ».
Grâce à Sergio Leone qui le choisit après le refus d’acteurs plus connus, Eastwood crée au début des sixties un archétype d’antihéros qui allait marquer les décennies suivantes. Il joue ce chasseur de primes barbu et taciturne, en poncho mexicain dans « POUR UNE POIGNÉE DE DOLLARS », « …ET POUR QUELQUES DOLLARS DE PLUS » et « LE BON, LA BRUTE, LE TRUAND ». Eastwood transpose ce personnage dans l’univers policier dans « UN SHÉRIF À NEW YORK » en Texan perdu dans Big Apple et confirme l’essai avec « L’INSPECTEUR HARRY » où il fignole son rôle de justicier mal embouché et réfractaire à l’autorité, avec un certain génie. Il développe ce personnage dans cinq films allant de la justification (« MAGNUM FORCE ») à l’autoparodie (« LA DERNIÈRE CIBLE »), en passant par la banalisation (« L’INSPECTEUR NE RENONCE JAMAIS ») et finalement la désincarnation (« SUDDEN IMPACT / LE RETOUR DE L’INSPECTEUR HARRY »).
On le voit en innocent lynché mué en vengeur implacable dans « PENDEZ-LES HAUT ET COURT », en ranger à la gâchette facile dans « QUAND LES AIGLES ATTAQUENT », en chercheur d’or chantant dans « LA KERMESSE DE L’OUEST », en G.I. corrompu dans « DE L’OR POUR LES BRAVES » ou en mercenaire indécis dans « JOE KIDD ».
Eastwood se lance dans la réalisation au début des seventies et s’affirme comme un authentique auteur, même s’il met des années à se faire reconnaître via l’Europe. Dans ses propres films, il s’amuse à fissurer son image en faisant du ‘gringo’ un fantôme dans « L’HOMME DES HAUTES PLAINES » et « PALE RIDER / LE CAVALIER SOLITAIRE », une ruine humaine dans le sublime « IMPITOYABLE » (qui lui vaut l’Oscar) ou en réduisant son superflic à l’état d’ivrogne inapte dans « L’ÉPREUVE DE FORCE », de solitaire pervers dans « LA CORDE RAIDE » (qu’il n’a pas signé, mais tout de même réalisé) ou de vétéran ringard dans « LA RELÈVE », de ranger obtus dans « UN MONDE PARFAIT », de cosmonaute ressorti du placard dans « SPACE COWBOYS », ou encore de flic transplanté de « CRÉANCE DE SANG ».
Il s’essaie à la comédie ‘redneck’ en jouant le boxeur à poings nus de « DOUX, DUR ET DINGUE » et « ÇA VA COGNER ! », le directeur du cirque ringard de « BRONCO BILLY ». Il lui arrive même d’être mauvais dans de mauvais films : le pilote de « FIREFOX : L’ARME ABSOLUE », le flic des années 30 de « HAUT LES FLINGUES ! », le chasseur de primes de « PINK CADILLAC » ou le tueur à gages de « LA SANCTION ».
Mais là où Clint surprend, c’est qu’il se révèle réellement bon comédien dès que l’occasion se présente de jouer des rôles un tant soit peu complexes : le soldat manipulateur dans « LES PROIES », le Sudiste irréductible de « JOSEY WALES, HORS-LA-LOI », le sergent-la-terreur enroué dans « LE MAÎTRE DE GUERRE », le garde du corps à bout de souffle de « DANS LA LIGNE DE MIRE », le photographe énamouré de « SUR LA ROUTE DE MADISON », le voleur témoin d’un meurtre présidentiel dans « LES PLEINS POUVOIRS », le reporter alcoolique dans « JUGÉ COUPABLE », l’entraîneur désespéré de « MILLION DOLLAR BABY » et surtout le jumeau de John Huston dans « CHASSEUR BLANC, CŒUR NOIR » où il est habité par la grâce, sont des interprétations éminemment oscarisables. Son personnage de vieux dur à cuire au cœur d’or dans « GRAN TORINO » est du pur concentré d’Eastwood, une sorte d’hommage à lui-même, par un auteur se jouant de la notion de narcissisme.
À noter qu’au rayon des curiosités, il apparaît en mari ennuyeux d’une ménagère italienne dans un sketch des « SORCIÈRES » et le temps d’un ‘caméo’ dans le film « CASPER » et qu’il réalise plusieurs films : « BREEZY », « BIRD », « MINUIT DANS LE JARDIN DU BIEN & DU MAL », « MYSTIC RIVER » (son chef-d’œuvre ?), « LETTRES D’IWO JIMA », « MÉMOIRES DE NOS PÈRES » ou « INVICTUS », dans lesquels il n’apparaît pas.
En ‘96, Eastwood participe à l’élaboration d’un CD-ROM sur sa vie et son œuvre. En ‘98 et ‘99 paraissent deux biographies le présentant l’une comme un saint (l’autorisée, bien sûr signée par son ami Richard Schickel) et l’autre comme un monstre hollywoodien. L’une est édifiante, l’autre évidemment beaucoup plus drôle.
À la TV, outre ses sept années dans la série « RAWHIDE », on le voit en prospecteur moustachu dans « DEATH VALLEY DAYS », en pistolero arrogant dans « MAVERICK », en rebelle sans cause dans « HIGHWAY PATROL » et en cadet dans « WEST POINT ». Il apparaît dans son propre rôle dans « MON AMI ED ».