Dans la lignée des polars noirs à construction spiroïdale, « LA PEUR AU VENTRE » fait plutôt partie des réussites de ce sous-genre, n’ayant finalement que peu de dettes envers son promoteur Quentin Tarantino.
Thriller stylisé – un peu trop systématiquement, parfois – le film contient des séquences magistrales, comme celle du gamin russe prisonnier du couple monstrueux, sorti tout droit d’un conte de fées classé X, ainsi qu’une ou deux fusillades époustouflantes, pour une fois sans inspiration hongkonguaise.
Mais c'est la présence inattendue et persistante d’un vieux mythe américain, qui frappe dans « LA PEUR AU VENTRE ». Dans cet univers de mafia russe, de caïds italiens, sous la caméra d’un réalisateur Sud-Africain, passe régulièrement le spectre de… John Wayne.
Neveu d’un chef de Little Odessa, Anzor (Karel Roden) idolâtre le « Duke » depuis son enfance. À l’époque, on lui avait offert un projecteur 16MM et une copie des « COWBOYS », réduite à dix minutes. Passé à la censure, le film ne contenait pas la mort de John Wayne !
Depuis, Anzor revoit sans arrêt le DVD du film, espérant à chaque vision, que son héros survivra. Ce personnage d’Anzor, odieux, tabasseur de femmes et d’enfants, s’est fait tatouer l’effigie du « Duke » dans le dos, et au moment de mourir, glisse ses pouces dans son ceinturon, comme son idole, avant de s'éloigner, en imitant sa démarche si particulière.
Quand son beau-fils veut le provoquer, il n’hésite pas à commettre le blasphème suprême, en déclarant : « Le Duke était une tapette ».
Avalanche de clins d’œil, appuyée par le fait que le ripou (Chazz Palminteri) se nomme Rydell, comme le Mark du même nom, qui est le réalisateur des « COWBOYS », ce polar frénétique et violentissime, cite respectueusement ses sources, gardant un orteil dans le passé.