C'est toujours un grand plaisir que de voir Al Pacino renaître régulièrement de ses cendres. Après ses infâmes polars avec Jon Avnet, revoici donc le grand Al dans ses œuvres dans « YOU DON’T KNOW JACK », un téléfilm HBO basé sur le combat d’un médecin adepte de l’euthanasie, qui fut surnommé « Dr. Mort ».
Malgré ses (déjà) 70 ans, Pacino est vieilli pour ressembler au véritable Kevorkian et fermement dirigé par Barry Levinson, il compose un personnage complexe et excentrique d’une belle texture. Mais le réalisateur a eu l’instinct de ne pas faire de son film un one-man-show et a donné de l’espace aux personnages secondaires. Ainsi Brenda Vaccaro, actrice des seventies un peu oubliée aujourd'hui, est-elle magistrale dans le rôle de la sœur soumise mais grande gueule et Danny Huston – acteur de plus en plus épanoui – fait-il un grand numéro en avocat flamboyant.
Levinson adopte un style singulier, entre l’ultra-réalisme (on a du mal à déterminer si les interviews de « suicidés » sont réelles ou reconstituées) et la fable et parvient à maintenir l’intérêt et l’émotion sans jamais tomber dans les travers du biopic hollywoodien ou les facilités de l’hagiographie. Son Kevorkian n’est pas parfait, ni exemplaire, c'est un sac de nœuds invivable et asocial, radin, égotique et incontrôlable, mais grandi par sa croisade. Et on est souvent partagé entre l’horreur et l’admiration : les euthanasies « sauvages » en pleine nuit, à l’arrière d’une camionnette sont assez perturbantes.
Dans un casting très riche, on retrouve John Goodman (déjà co-équipier de Pacino dans l’excellent « SEA OF LOVE ») en ami aveuglément dévoué, Susan Sarandon en alliée elle-même confrontée à la maladie.
« YOU DON’T KNOW JACK » est un beau téléfilm, parfaitement adapté au média et propice à l’ouverture d’un débat sur un sujet toujours tabou et inconfortable.
À NOTER : le titre original est un jeu de mots entre le prénom de Kevorkian et l’expression « You don’t know Jack » qui signifie « Tu n’en sais rien ». Intraduisible bien sûr. Le titre français est donc un plus basique « LA VÉRITÉ SUR JACK ».