Le massif Lino Ventura et le sage et académique Claude Pinoteau ont tourné quatre films ensemble. Deux très bons (« LE SILENCIEUX » et « LA GIFLE »), un moyen (« LA SEPTIÈME CIBLE ») et un… très moyen : « L'HOMME EN COLÈRE », filmé à Montréal.
On a déjà souvent vu notre bon Lino en homme seul contre tous, lancé dans une quête de vérité au péril de sa vie. Ce fut une thématique récurrente de sa fin de carrière, que ce soit chez Deray ou Rosi. Ici, il recherche son fils au Canada, lui-même traqué par des malfrats et par la police. Le scénario n’a rien d’original, mais en vaut un autre.
Le problème vient des options prises par les auteurs au départ : visuellement, le film n’a rien de la patine habituelle de la « Qualité France ». C'est torché au zoom, charbonneux, monté à la tronçonneuse et la musique fait mal aux ouïes. De plus, le choix de tout doubler en français sans accent, rend le film presque abstrait. Aucun « local » n’a l’accent si caractéristique de nos amis Canadiens, on reconnaît les voix des doubleurs stakhanovistes de films U.S. (et même Marcel Bozzuffi, au passage !), Angie Dickinson jouant une serveuse américaine exilée, parle un français châtié et Ventura lui-même s’est postsynchronisé ! Cette bouillie sonore fait ressortir les invraisemblances du scénario, ses naïvetés et ôte toute crédibilité au film, en le privant d’une facette « poisson hors de l’eau » qui en aurait certainement fait tout le prix.
Reste un suspense pantouflard et languissant, dont on saisit mal les tenants et aboutissants. On prend le temps de se raconter, de s’expliquer, des flash-backs affreusement mal intégrés viennent rompre régulièrement le rythme et le film s’achève abruptement en queue de poisson.
Reste la « gueule » burinée et tourmentée d’un Ventura en service minimum, qui a déjà joué ce rôle bien des fois et a ici juste changé la couleur de son imper. Angie Dickinson, belle bien sûr, sert essentiellement de chauffeur à son partenaire. Quant à Donald Pleasence, il passe en voisin, pour jouer les entremetteurs ambigus et gloussants.
Notons enfin – c'est trop ancien pour être un ‘spoiler’ ! – que l’ami Lino écope à la fin, de la célèbre « Balle-Dans-L’épaule-Sans-Gravité-Qui-Cicatrise-Rapidement », qui lui permettra de retrouver Angie après le mot « FIN » !